Parents et enfants hier, aujourd’hui et demain. Produire l’ordinaire, un travail politique au quotidien

Résumé de soumission

Dans notre projet de recherche, nous nous intéressons à ce que nous appelons la production de l’ordinaire par les familles dont l’un des membres est polyhandicapé. Cette notion de « production de l’ordinaire » renvoie à deux dimensions de la vie des familles. La première est la manière dont ces familles, comme toute autre famille, construisent un ordre familial, lui donne un sens et un rythme, et ce faisant, s’inscrivent dans un monde commun ; elles se positionnent par rapport aux normes et valeurs du monde commun pour s’y conformer ou s’en écarter. La deuxième dimension est le travail que ces familles réalisent, « en plus », pour ordinariser ce qui pourrait distinguer leur vie d’une vie « ordinaire ». Dans le contexte actuel, valorisant l’inclusion et l’autonomie, ce travail « d’ordinarisation » de leur réalité prend sans doute plus d’importance qu’auparavant. Nous chercherons à analyser les deux dimensions du travail de production de l’ordinaire de ces familles, mais aussi à faire apparaître ses évolutions au cours du temps, en contrastant des générations de familles.Contexte de la recherche.Notre projet de recherche s’inscrit dans un programme plus large dont l’objectif est de constituer une histoire du polyhandicap. Dans un premier volet de ce programme (projet HaRaSoHi, financement IRESP-CNSA, 2014-17), nous avons retracé l’émergence et l’évolution des catégories « handicaps rares » et « polyhandicap » dans l’histoire du secteur médico-social, entre 1960 et 2014. Nous avons montré que les définitions de ces catégories sont liées à la définition des modalités spécifiques d’accompagner les enfants ainsi qualifiés. Après avoir réalisé l’histoire institutionnelle de ces catégories, nous souhaitons réaliser une histoire des expériences familiales, telles que construites dans un récit biographique par les personnes concernées. Nous souhaitons également élargir notre regard et analyser, au-delà de la question des modalités de la prise en charge, la « vie presqu’ordinaire de ces familles ». Cette entrée situe notre recherche dans un ensemble de travaux de sciences sociales qui portent sur les reconfigurations familiales suite à la survenue d’un handicap. Certains auteurs se sont intéressés à l’expérience des parents, frères et sœurs, aux relations intra ou extra-familiales, aux rôles d’aidant des proches, aux expertises et connaissances qu’ils développent, à leurs engagements associatifs. Tout en reprenant certains apports de ces recherches, nous souhaitons changer notre perspective d’analyse et nous intéresser corrélativement à ce qui est similaire et à ce qui est différent, par rapport à toute famille, dans la manière dont les familles dont l’un des enfants est polyhandicapé, produisent leur ordinaire. Pour cela, nous adopterons une posture méthodologique qui consiste à suspendre l’entrée par la notion de handicap, tout en laissant ouverte la question de la spécificité de ces familles.ObjectifsPour réaliser cette analyse de la « production de l’ordinaire », une double entrée sera privilégiée : 1. Analyser la nature du travail réalisé au quotidien=> Nous porterons notre attention sur les différentes dimensions du travail réalisé au quotidien par les personnes pour produire un ordinaire, travail qui ne se réduit pas à un travail de care, mais qui englobe aussi une dimension éducative, émotionnelle, sociale… Analyser les formes de ce travail, ses finalités et ce qu’il produit sera un premier objectif. =>nous porterons notre attention sur le travail « d’ordinarisation » de la réalité empirique, qui consiste à intégrer, métaboliser… les spécificités de ces personnes et familles. Notre hypothèse est que cette ordinarisation est liée à des manières de faire, qui d’une part se font discrètes, d’autre part, permettent une symétrisation de la relation et du statut des personnes qu’elle implique. Nous parlerons pour désigner ces pratiques de « travail d’influence ».2. Analyser les formes relationnelles ou formes d’interaction qui s’instaurent entre les personnes.La vie ordinaire de toute famille est faite d’interactions qui impliquent différentes personnes, membres de la famille ou extérieures à elle, comme les professionnels, mais aussi des « non-humains » tels les objets, les animaux… Décrire ces interactions, explorer les processus sur lesquels elles reposent, permettra de rendre visible la production d’un monde commun par les acteurs, reposant sur des valeurs, des normes, des expériences partagées, etc…, mais aussi la participation et la position de chacun d’eux.MéthodeLa méthodologie s’articule autour de trois axes de travail : la mise en place d’un groupe de travail pour réfléchir et mettre en œuvre une approche participative tout au long de la recherche, une enquête ethnographique dont l’objectif sera la réalisation de monographies de familles, et enfin un séminaire d’enquête pour explorer avec la diversité des acteurs impliqués, les manières d’ordinariser une réalité et les personnes, qui repose sur le « travail d’influence ». Pour tenir ensemble ces trois axes, notre projet repose sur la collaboration de sociologues (B. Bonniau, L. Velpry, P. Vidal-Naquet et M. Winance), de l’observatoire d’Handéo (C. Desjeux) et de l’Atelier des jours à Venir (M. Pothier, L. Riboli-Sasco et C. Ribrault).Perspectives=> Au niveau scientifique, notre projet permettra de rendre compte de la « vie presqu’ordinaire » des familles dont l’un des membres est polyhandicapé, et qui repose sur une tension entre travail ordinaire et travail d’ordinarisation. Il permettra aussi de mettre en évidence des évolutions sur le sens de « l’ordinaire » entre des générations de famille, en lien avec l’évolution des prises en charge. => Au niveau pratique et politique, nous réfléchirons aux différentes formes de production possible et à la manière de les diffuser auprès de différents publics, afin qu’elles puissent être des ressources pour les acteurs. Les connaissances issues de cette recherche serviront également à Handéo pour nourrir plusieurs de ses actions en direction des personnes polyhandicapées

Equipes du projet

Coordonnateur :

WINANCE Myriam

N° ORCID : 0000-0003-2317-2844

Structure administrative de rattachement : Inserm

Laboratoire ou équipe : Cermes3 (Inserm U988)

N° RNSR : 200217606H


Autres équipes participantes :

Responsable de l'équipe 2 : DESJEUX Cyril
HANDEO (association loi 1901)


Responsable de l'équipe 3 : VIDAL-NAQUET Pierre
CERPE (Centre d'Étude et de Recherches pour la Petite Enfance)


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