Interactions soignants – patients et reconfigurations des inégalités sociales de santé (Projet ISP-ISS)
Résumé de soumission
Hypothèse : Dans le cadre de ce projet de recherche, nous posons l’hypothèse d’un travail relationnel renouvelé tant des patients que des soignants, dans le contexte de développement de l’ambulatoire, et d’attentes en termes d’autonomie et de participation des patients. A partir des travaux de Strauss (1992), nous considérons le soin comme le produit négocié d’interactions continues entre patients et soignants, et mobilisons la notion de travail de santé pour identifier la part active du patient.
Objectifs : Nous visons les objectifs suivants :
a) spécifier les évolutions de ces interactions soignants – patients et la façon dont les configurations actuelles peuvent susciter de nouvelles fragilités sociales, ou au contraire, participer à la réduction des inégalités sociales de santé (ISS).
b) identifier les compétences nécessaires dans ces interactions pour ne pas fabriquer, aggraver et, si possible, réduire les ISS.
Sur le plan théorique, outre des contributions-clé de sociologie, anthropologie et sciences politiques de la santé, nous prenons appui sur les apports de l’école de Palo Alto qui déconstruisent le sens commun de la communication comme acte essentiellement verbal, conscient et volontaire, pour la considérer comme processus social situé, dans lequel chacun met en jeu son identité en même temps que celle-ci est retravaillée dans les interactions, en mobilisant une diversité de codes sociaux (Winkin, 1981). La prise en compte de ce caractère intrinsèquement construit et social de la communication est tout particulièrement requise lorsque les relations sont marquées par des inégalités. Nous retenons une définition non essentialiste des compétences comme processus se construisant dans des interactions entre sujets, connaissances et contextes (Grosjean, 2007 ; Gherardi, 2006), incorporées dans des êtres sociaux et susceptibles d’être en partie verbalisées ou manifestées, mais aussi matérialisées dans des procédures et des règles. Nous interrogeons en regard des approches plus behavioristes des compétences relationnelles. Quant à la notion d’autonomie, elle est ambigüe et doit d’autant plus être questionnée qu’elle pourrait contribuer à écarter des patients non conformes aux comportements attendus. Les ISS se posent en effet en termes de « gradient social » (Lang, 2009) et s’étendent, au-delà des populations les plus défavorisées, aux individus qui ne trouvent pas ou plus les appuis nécessaires pour faire face au travail de santé (Corbin & Strauss, 1985).
Méthodologie : Pour répondre à ces questions, nous étudierons deux ensembles de terrain : le premier explore des pratiques observables du travail en situation ambulatoire, et les compétences mises en jeu ; le second est celui formalisé par des formateurs médecins qui enseignent de futurs praticiens sur la relation médecin-patient. Il s’agit :
1) Des dispositifs de suivi et d’accompagnement téléphonique de patients atteints de cancer, AMA 1, AMA AC et Coach développés à l’Oncopôle de Toulouse, significatifs des évolutions vers la « 3ème médecine » (Grimaldi et al. 2017). Sur ces terrains, les partenariats engagés nous donnent accès à des documents, des données de cohortes constituées, des observations (60h prévues) et des entretiens auprès de patients en cours de suivi et l’ayant été (42 entretiens patients, 10 oncologues) ;
– Un nouveau dispositif de formation et d’évaluation des compétences cliniques au sein des études médicales (2e à 6e année), conçu à la Faculté de Médecine Purpan de Toulouse, pour mieux former les futurs praticiens aux différents rôles spécifiés dans le référentiel de compétences du BO (16 Mai 2013). Le partenariat développé sur ce terrain donne accès à l’équipe enseignante (10 entretiens), aux supports et situations de formation (SPOCS, « chablons » de séances de patients simulés ; observations de journées de formation), et aux étudiants (600) pour questionnaires, et entretiens (30).
Résultats attendus : Nos résultats de recherche doivent permettre de mettre en évidence les différences et convergences au plan des contraintes des situations, compétences patients et soignants, et cadres sociaux d’interactions à l’œuvre entre : 1) des situations en pratiques dans des dispositifs de suivi ambulatoire avec montée en puissance du travail de santé des patients, et recompositions des relations soignants-patients, et 2) des situations projetées de relations soignants-patients telles qu’enseignées et perçues dans le cursus de formation. Le projet est interdisciplinaire, associant des sciences sociales (sociologie et anthropologie du corps et de la santé, sciences de la communication), des sciences médicales (épidémiologie, santé publique), et les sciences informatiques avec la construction d’un ensemble de traces modélisées ou M-Trace (Djouad, 2013). Il est international avec la participation de chercheurs et professionnels de santé de l’Université d’Ottawa.
Equipes du projet
Coordonnateur :
MAYERE Anne
N° ORCID : 0000-0002-1936-0618
Structure administrative de rattachement : Université Toulouse 3 Paul Sabatier
Laboratoire ou équipe : CERTOP – Centre d’Etude et de Recherche Travail Organisation Pouvoir, IFERISS FED 4142 UMR CNRS 5044, Axe SANTAL – Santé Alimentation
Autres équipes participantes :
Responsable de l'équipe 2 : BASSON Jean- Charles
Université Paul Sabatier - Toulouse 3 Pôle Sport, CRESCO EA 7419
Responsable de l'équipe 3 : LANG Thierry
Université Toulouse 3 Paul Sabatier - LEASP UMR 1027- équipe Cancer et maladies chroniques : inégalités sociales de santé, accès primaire et secondaire aux soins
Responsable de l'équipe 4 : CATTEAU Olivier
Université Toulouse 3 Paul Sabatier - IRIT, UMR 5505– Institut de Recherche en Informatique de Toulouse, équipe Service IntEgration and netwoRk Administration
Responsable de l'équipe 5 : GROSJEAN Sylvie
Université d’Ottawa (Canada), GRICO – Groupe de Recherche Interdisciplinaire en Communication Organisationnelle
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