L’EXPERIENCE DU HANDICAP ET DE L’AUTONOMIE CHEZ LES PERSONNES CONCERNEES PAR LE TRAUMATISME CRANIEN
Résumé de soumission
CONTEXTE : Avec 150 000 traumatismes crâniens (TC) répertoriés annuellement en France (Bayen et al., 2012), ces accidents décrits par l’OMS comme une « épidémie silencieuse » (Perroux et al. 2013), représentent la première cause de mortalité et une cause majeure de handicap résiduel chez les enfants et les adultes (Quintard et al., 2002). En effet, de nombreuses personnes ayant subi un TC (y compris léger) vivent avec des séquelles résiduelles, cognitives, affectives et limitatives, entraînant de la fatigue et affectant durablement, non seulement, leur récupération fonctionnelle, mais également leur fonctionnement social, leur qualité de vie et leur autonomie. Malgré ce portrait épidémiologique, il existe peu d’études sur l’expérience des personnes ayant subi un TC et aucune qui adopterait une approche monographique croisant ainsi le point de vue des victimes, des proches aidants et des professionnels et intégrant un groupe témoin. En outre, en France, aucune étude ne permet de comparer les catégories socioprofessionnelles (CSP) face au risque de TC et la gestion du handicap. Et pourtant, des travaux réalisés à l’étranger (Whitman et al., 1984) mettent en évidence une incidence et une mortalité beaucoup plus élevées dans les milieux défavorisés, concernés par ailleurs par un pronostic plus défavorable à court et long termes – à gravité de TC égale. En parallèle, toutes les études convergent : « Les hommes sont plus touchés que les femmes sauf après 75 ans, [alors que] trois pics d’incidence liés à l’âge sont relevés : <5 ans, 15-24 ans et >75 ans » (Tazarourte et al., 2008 :142). Au-delà de la CSP, l’âge et le sexe constitueraient donc deux autres facteurs de risque majeurs d’exposition aux TC, mais là, non plus, aucune étude sociologique francophone ne permet de rendre compte de ces facteurs de disparité, voire d’inégalités sociales de santé (ISS), alors que la perception différentielle du risque d’exposition au TC, les interactions soignants/soignés et les représentations inhérentes au handicap restent sous-documentées. OBJECTIFS : Le présent projet se propose d’explorer l’expérience du handicap chez les personnes ayant subi un TC, celle de leurs proches et des professionnels impliqués dans leur prise en charge, en documentant les besoins de compensation des accidentés ainsi que l’impact du TC et des parcours de soins sur leur participation sociale et leur autonomie. Revisitée à l’aune de la notion de la déprise (Meidani et Cavalli, 2018), l’autonomie est ici définie comme un faisceau d’interdépendances, une entreprise collective négociée, toujours en devenir. Plus spécifiquement ce projet a pour objectifs de : 1) saisir l’expérience et le processus d’autonomisation des personnes ayant subi un TC en identifiant les facteurs individuels et socio-environnementaux qui participent de son évolution ; 2) décrire l’impact de cette expérience de handicap chez les proches aidants ; 3) explorer les pratiques et le point de vue des professionnels et des structures (hospitalières et associatives) impliquées dans leur soutien ; 4) constituer un réseau avec des acteurs du secteur socio-sanitaire afin d’orienter leurs interventions de réadaptation pour favoriser la reprise des activités sociales, professionnelles… des personnes concernées ; 5) créer un outil de communication (film documentaire) afin d’accompagner la pratique des acteurs sociaux et associatifs ainsi que le grand public.METHODE : L’équipe des chercheurs se propose de mettre en place un protocole d’enquête mixte, à la fois qualitatif et quantitatif. Pour le volet qualitatif, et dans une perspective macro- et méso-sociologique, il s’agira de faire un état de lieu des politiques publiques en lien avec le handicap et les dispositifs des soins hospitaliers, administratifs et associatifs afférents. À un niveau microsocial, l’échantillon sera composé de 40 personnes ayant subi un TC léger, modéré ou sévère, il y a 1 à 5 ans, âgées de plus de 18 ans au moment de l’enquête, et considérés en parallèle dans le cadre des consultations de soins (N=40H d’observation) au CHU de Toulouse et/ou à domicile. Une comparaison avec un groupe témoin : 40 personnes concernées par un AVC (accident vasculaire cérébral) sera également considérée. L’échantillon du corpus qualitatif comporte autant des proches aidants (N=40) et une vingtaine des professionnels impliqués dans leur prise en charge. Pour le volet quantitatif, un échantillon de 300 personnes ayant subi un TC répondra aux mêmes critères d’inclusion et sera interrogé à travers le PAAC (Profil d’Autonomie pour Adultes Cérébrolésés), administré en face-à-face. PERSPECTIVES : L’ancrage interdisciplinaire de ce projet se retranscrit dans les partenariats déjà établis à l’occasion d’anciennes collaborations avec le CHU de Toulouse, l’INSERM et l’AFTC MP. Il s’inscrit dans l’axe prioritaire de recherche et de soin de la Fédération Hospitalo-Universitaire des Handicaps Cognitifs, Psychiques et Sensoriels (FHU HoPeS), qui fédère à la fois les cliniciens, les chercheurs en sciences cognitives et en neuro-imagerie, mais questionne également les sciences humaines (sociologie, psychologie, la psycholinguistique, philosophie, droit) autour de la thématique du TC. Le projet propose la mise en place des dispositifs transmédias innovants (capsules d’interviews, site, conférences-débats, reportage, soutien-conseils avec des patients-ressources) qui peuvent s’avérer particulièrement pertinents, d’autant que les questions d’empowerment susceptibles d’obtenir une meilleure efficacité des protocoles d’accompagnement semblent aujourd’hui une des pistes les plus prometteuses de l’action sanitaire. À cela s’ajoute la plus-value d’une perspective englobante pour étudier les trajectoires du handicap et d’autonomie, ce qui est primordial pour comprendre les déterminants individuels et collectifs qui sous-tendent l’expérience du TC. Il s’agit alors de mieux saisir les besoins des personnes ayant subi un TC dans leur vie quotidienne, ce qui permettra de mettre en place des actions pour atténuer réduire les difficultés et réduire les ISS (Lang et al., 2016) qui en résultent
Equipes du projet
Coordonnateur :
MEIDANI Anastasia
N° ORCID : 0000-0002-5879-9367
Structure administrative de rattachement : CNRS
Laboratoire ou équipe : LISST-CERS UMR 5193 CNRS
Autres équipes participantes :
Responsable de l'équipe 2 : BARON Nicolas
AFTC MP, en collaboration avec le Service de Médecine Physique et de Réadaptation, CHU de Toulouse (ToNIC UMR1214 Inserm/UPS FHU HoPeS UPS/Inserm/CHU Toulouse)
Responsable de l'équipe 3 : DAGORN Johanna
ARESVI , Association de Recherche et d’Etude sur la Santé, la Ville et les Inégalités
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