Impact de l’isolement social sur la rechute : Rôle du circuit cortico-habénulo-mésencéphalique

Résumé de soumission

En Europe, les troubles d’usage de substances psychoactives représentent un problème majeur de santé publique. En effet, un rapport de 2022 indique qu’environ 83,4 millions d’adultes, soit 29% de la population européenne, ont consommé une ou des substances psychoactives au cours de l’année écoulée. Parmi ces substances, l’usage de cocaïne est en constante augmentation, notamment en raison d’une importante production massivement importée (64.000 saisies représentant 213 tonnes pour l’année 2019), qui conduit à la banalisation de son usage. Ainsi, cette substance est considérée comme la seconde substance illicite la plus consommée en Europe, juste après le cannabis. En effet, environ 3,5 millions d’européens âgés de 15 à 64 ans indiquent en avoir consommée dans l’année écoulée. Malheureusement le pouvoir addictif de la cocaïne est important et conduit souvent à des troubles de l’usage, caractérisés notamment par une perte de contrôle de la consommation et des symptômes de manque lorsque la substance n’est plus disponible ou lors des phases d’abstinence. Un autre aspect important de la pathologie est le risque élevé de rechute lorsque les usagers essayent d’arrêter ou simplement de contrôler leur consommation. En effet, parmi les patients pris en charge pour troubles d’usage de cocaïne, 50% ont déjà été pris en charge ultérieurement pour le même trouble. Cet important taux de rechute démontre bien qu’une fois la pathologie installée la vaste majorité des patients peinent à se sortir du cercle vicieux dans lequel la cocaïne les a amenés.
Bien que les travaux de recherche fondamentale et clinique aient apporté de solides connaissances sur les mécanismes mis en jeu lors de la transition entre un usage récréatif et les troubles de l’usage ainsi que les régions cérébrales impliquées dans certains aspects de la pathologie, la compréhension des phénomènes de rechute et notamment le rôle de certains facteurs de risque environnementaux reste limitée. Entre autre, l’environnement social des consommateurs est particulièrement important et semble pouvoir à lui seul participer au phénomène de rechute. En effet, l’un des meilleurs prédicteurs de trouble de l’usage de substances psychoactives est la présence d’usagers dans son entourage (famille ou amis). De plus, la destruction de l’environnement social des personnes atteintes de trouble de l’usage est bien connue et renseignée ; la plupart d’entre elles décrivant un sentiment fort d’isolement social ou de solitude. Cependant, comment un système nerveux central perturbé par l’usage de cocaïne intègre les informations sociales reste méconnu. De plus, les potentiels effets facilitateurs de l’isolement social sur la prise de cocaïne, pouvant conduire à la rechute, doivent être étudié.
Dans ce contexte, ce projet Amorçage de 12 mois vise à évaluer, dans un modèle murin, l’impact de l’isolement social aigu (24 heures) et chronique (6 semaines) sur les comportements liés à la cocaïne. Pour cela des souris adultes mâles et femelles seront isolées ou non puis soumises à différents protocoles de conditionnement de préférence de place (CPP) à la cocaïne et de rechute de CPP. A l’aide de techniques immunohistochimiques et d’imagerie calcique, nous évaluerons comment le réseau formé par le cortex cingulaire antérieur (CCA), l’habénula latérale (HbL) et le locus coeruleus (LC), que nous avons récemment mis en évidence dans la rechute à la cocaïne induite par le stress, est impacté par les conditions sociales. Notamment, nous évaluerons comment l’isolement social aigu et chronique perturbent le recrutement de ce réseau lorsque les animaux ont accès à la cocaïne. Ensuite, nous utiliserons des stratégies virales innovantes permettant de manipuler spécifiquement les neurones du réseau CCA-HbL/LC lors des tests de CPP et de rechute à la cocaïne, dans nos modèles animaux d’isolement social. Plus précisément, nous inhiberons l’activité de ce réseau lorsque des souris isolées ou non effectueront les tests de CPP et de rechute de CPP.
Ce projet Amorçage a le potentiel d’apporter un éclairage fondamental nouveau sur l’impact de l’environnement social sur les comportements liés à la prise de cocaïne, notamment le phénomène de rechute. L’utilisation de techniques d’imagerie nous permettra également de mieux comprendre comment certaines régions du cerveau intègrent et font face à des périodes d’isolement social. Enfin, l’utilisation et la comparaison de souris mâles et femelles nous permettra de mieux comprendre les différences observées chez l’Homme. En effet, les patients admis pour troubles de l’usage de cocaïne sont à 85% des hommes, ce qui suggère de fortes différences intersexuelles dans le phénomène de rechute.
En conclusion, ce projet a le potentiel d’apporter des connaissances nouvelles en lien avec les mécanismes cérébraux sous tendant la rechute à la cocaïne qui serviront dans l’élaboration de projets plus ambitieux concernant les troubles de l’usage de substances psychoactives.

Equipes du projet

Coordonnateur :

MATHIS Victor

N° ORCID : 0000-0002-3690-0970

Structure administrative de rattachement : CNRS

Laboratoire ou équipe : Institut des Neurosciences Cellulaires et Intégratives (INCI) - UPR3212, CNRS

N° RNSR : 200918500Z


Autres équipes participantes :

Responsable de l'équipe 2 : BEFORT Katia
Laboratoire de Neurosciences Cognitives et Adaptatives (LNCA) - UMR 7354, CNRS


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