Étude historique et sociologique des logiques et des normes influençant la mise en œuvre du recours aux psychédéliques dans la recherche sur les addictions

Résumé de soumission

Contexte
La première vague d’études médicales occidentales sur les psychédéliques (1950/70) a concerné prioritairement le traitement des addictions. Depuis une quinzaine d’années, la reprise de ces recherches vise à réévaluer les bénéfices thérapeutiques de ces substances. Des essais cliniques sont progressivement mis en place.
Objectifs
(1) Documenter l’histoire des essais cliniques employant des psychédéliques en addictologie et psychiatrie et leur réémergence contemporaine. Étudier la manière dont les addictologues ont investi ce champ. Saisir les dynamiques paradoxales de cet engagement impliquant le recours aux stupéfiants. Analyser les discours, pratiques, questionnements épistémologiques et méthodologiques des équipes passées et présentes.
(2) Contextualiser la dynamique de ces recherches dans une scène sociale plus large via l’étude de différents acteurs (citoyens, politiques, économiques, culturels, médiatiques).(3) Analyser le vécu et les pratiques underground du recours aux psychédéliques (automédication, thérapies clandestines, communautés d’usagers récréatifs). Comparer les attentes, représentations et méthodes des usagers et thérapeutes des milieux underground et scientifique.
Notre étude sera centrée sur le champ psychédélique français, tout en la situant historiquement sur le plan international. Elle rendra compte de particularité des pratiques des différents acteurs par une étude transnationale contemporaine. Un axe de recherche transversal visera à étudier la place des femmes dans la communauté psychédélique, afin de valoriser leurs expertises et spécificités.
Hypothèses
(1.a) Les représentations des acteurs cliniques et scientifiques impliqués dans des protocoles de recherche sur les psychédéliques sont imprégnées par l’histoire des essais cliniques. Ces différents régimes de production de savoirs scientifiques visibilisent, et donc invisibilisent, des normes et critères d’efficacité thérapeutique de ces substances. (1.b) La démarcation des territoires de légitimité entre addictologie et psychiatrie est source de tension. 1.c) Les addictologues se sont investis dans le champ psychédélique en précurseurs.
(2.a) Les représentations individuelles des substances psychédéliques façonnent et sont façonnées par les discours sociaux, culturels, médiatiques, associatifs, économiques, et politiques. (2.b) La communauté scientifique et associative des psychedelics studies, et de fait ses pratiques, sont influencées par ce contexte évolutif et contribuent à sa transformation.
(3.a) Les représentations des consommateurs et des thérapeutes engagés dans des pratiques underground ou d’automédication via des psychédéliques divergent de celles des acteurs académiques. Elles visibilisent d’autres aspects du potentiel thérapeutique des psychédéliques. (3.b) Il existe une porosité dans les pratiques et usages promus par les milieux underground et scientifique.
Méthodes
Nous mobiliserons une méthodologie mixte, qualitative, quantitative et interdisciplinaire associant histoire, sociologie, anthropologie et santé publique.
L’approche quantitative se basera sur une étude scientométrique (analyse des publications des psychedelic studies) ; des enquêtes par questionnaires (examen du vécu des thérapeutes et usagers, tant profanes qu’inclus dans des essais cliniques) et une analyse des médias, des réseaux sociaux, sites web et forums (étude des imaginaires véhiculés par les acteurs académiques, économiques, politiques et usagers).
L’approche qualitative mobilisera une analyse documentaire basée sur une revue de la littérature et l’examen d’archives. Des entretiens semi-structurés et des focus-groups seront menés auprès des principaux acteurs du champ (analyse des cadres de pensées et des pratiques de cliniciens, chercheurs, patients, usagers profanes et membres d’associations). Des observations seront menées sur trois types de terrains : scientifique (protocoles de recherche et conférences), associatif (sociétés savantes, associations citoyennes, acteurs de la réduction des risques) et underground (thérapies clandestines, communautés numériques d’usagers, psychonautes).
Résultats attendus
Cartographier les différentes recherches en cours proposant un recours aux psychédéliques en addictologie et en psychiatrie. Identifier les verrous susceptibles d’entraver leur mise en place. Identifier les déterminants organisationnels, politiques, économiques, et sociologiques de ces freins et leviers. Construire de nouveaux savoirs avec l’ensemble des acteurs concernés et délimiter de nouvelles méthodologies et objectifs.
Perspectives
L’analyse des pratiques contemporaines et des contextes ayant provoqué l’arrêt des recherches médicales dans le passé permettra : (1) d’éclairer les acteurs contemporains (scientifiques, cliniques, politiques, associatifs et usagers) (2) d’optimiser l’implémentation de cette thérapeutique dans le système de soins et (4) d’accroître le partage interdisciplinaire de connaissances.

Equipes du projet

Coordonnateur :

MORGIEVE-MAS Margot

N° ORCID : 0000-0002-1305-3860

Structure administrative de rattachement : Inserm

Laboratoire ou équipe : Cermes3, Université Paris Cité, CNRS, Inserm

N° RNSR : 200217606H


Autres équipes participantes :

Responsable de l'équipe 2 : ROUX Perrine
Sesstim-UMR 1252, équipe SanteRCom, Aix-Marseille Université , Inserm


Responsable de l'équipe 3 : MOUTAUD Baptiste
Lesc, CNRS


Responsable de l'équipe 4 : MALLET Luc
UPEC, Université Paris Est Créteil


Responsable de l'équipe 5 : NOEL Xavier
Laboratoire de Psychologie Médicale et d’Addictologie Faculté de Médecine, Université Libre de Bruxelles


Responsable de l'équipe 6 : SABE Michel
Department of Adult Psychiatry, Belle-Idée, Geneva University Hospitals, Université de Genève


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